William G. Tapply – Dérive sanglante

Les lectures génèrent des envies différentes : de lire un autre titre, de voyager, de changer de travail… Le roman de William G. Tapply, intitulé Dérive sanglante, m’a fait songer à aller dans le Maine et d’y pousser la porte de la boutique Chez Kate – Appâts et articles de pêche. J’y bavarderais des nouveautés en matière de pêche (là, il faudrait réviser un peu, moi qui n’ai jamais pêché) et puis on irait s’asseoir avec Stoney et Ralph au bord de Bitch Creek… Une idylle qui serait peut-être un peu perturbée par la présence d’un cadavre flottant dans l’eau !

(…) un homme seul et sans racines, sans passé, sans vision nette de l’avenir, juste ces quelques éclats de mémoire flous qui semblaient le rattacher aux bois du Maine.

Stonewall Jackson Calhoun (Stoney tout simplement, pour nous qui sommes devenus ses amis) est un personnage au passé trouble. Après un long séjour dans un hôpital, il décide de s’installer dans le Maine, une région qui semble l’attirer de façon inexpliquée. Stoney a en effet perdu la mémoire, qui se réveille néanmoins de temps à l’autre en forme de petits flashs. Le Maine…

Les routes poussiéreuses flanquées de murets, le sol sablonneux, les champs brûlés avant les semis, les ruines d’anciennes fermes au bout de chemins à présent envahis par un fouillis de genièvre et de peupliers et de vieux pommiers noueux, le bruissement d’une perdrix qui s’envole, la queue blanche, soudain entr’aperçue, d’un cerf, les érables aux troncs desquels on fiche un robinet pour un extraire la sève, le toit en aluminium d’un grange, lesté de vieux pneus de tracteur en cas de tornade, les vaches Holstein et Jersey broutant dans les pâturages rocailleux, les grosses caravanes auxquelles il pousse des antennes de 6 mètres de haut, les verges d’or qui fleurissent entre les carcasses rouillées des automobiles mortes, les poules qui picorent le gravier devant les portes, les blizzards et les orages et les vents du nord-est en septembre, (…).

Le Maine avec ses anciennes exploitations agricoles, région fortement marquée par l’incendie de 1947… Stoney s’y installe dans les bois, travaille comme guide de pêche et sa vie suit son cours tranquille jusqu’au moment où son meilleur ami disparaît. Il se met alors à enquêter, épaulé par Kate ou le sherif Dickman. Il interroge des autochtones, des anciens…

Il portait de vieilles bottes en caoutchouc et une salopette par-dessus un T-shirt sans manches. Il tenait une grande clé à la molette à la main gauche et un mégot de cigare lui pendait aux lèvres. Il était petit et sec jusqu’à paraître maigre, avec un visage cousu de rides qui lui donnait l’air d’avoir deux fois son âge. Des mèches de cheveux d’un jaune blanchâtre s’échappaient de dessous sa casquette. Des poils de barbe blancs sur son menton et ses joues, deux dents manquantes, une lueur amicale dans les yeux.

Pas la peine de chercher, on ne trouve pas de points faibles à ce roman ! Des personnages intéressants, des descriptions vivantes (à la Steinbeck), une belle intrigue et… pour couronner le tout, le mystérieux « Homme au Costume » ! Hormis l’enquête principale, Stoney essaie également de comprendre son propre passé (de ce fait, il faut lire les trois tomes de façon chronologique pour suivre l’histoire personnelle). Je regrette qu’il n’existe que trois tomes (l’auteur est décédé en 2009) et j’attends avec impatience que les deux autres tomes de série soient réédités chez Gallmeister avec la nouvelle couverture, pour compléter ma collection et pour retrouver Stoney et Ralph. Ah, je ne vous ai pas parlé de Ralph ? Un chien extrêmement sympathique – je suis sûre que Monsieur Tapply a lui aussi eu un ami à quatre pattes qui lui a servi d’inspiration, tant on perçoit l’amour des animaux.

Vous aurez compris : si vous avez envie d’un policier intelligent, pas sanglant du tout (malgré le titre), avec un personnage principal plus qu’attachant, tout ça planté dans un décor du Maine, il ne faut surtout pas hésiter. Il vous suffit de recopier les informations de bas de page et d’aller :

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Dérive sanglante de William G. Tapply. Gallmeister, 2017, 280 pages.

 

11 réflexions sur “William G. Tapply – Dérive sanglante

  1. Marie-Claude 25 juin 2017 / 22:16

    Beau billet qui a l’avantage de braquer le projecteur sur ce délicieux roman. J’ai adoré son atmosphère et je suis tombée en amour avec Stoney! Je garde au chaud les deux autres tomes, avant d’y plonger.

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    • Eva 13 septembre 2017 / 10:36

      Oui, qui résisterait à Stoney qui pendant ses soirées lit une anthologie de la littérature américaine ? 🙂 J’ai hâte de lire la suite, en attendant j’ai commencé l’autre série de l’auteur, avec Brady comme personnage principal. Je vais en parler bientôt.

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    • Eva 13 septembre 2017 / 10:37

      Très très réussie. Je suis étonnée qu’elle ne soit pas un peu plus connue.

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  2. mjo 1 juillet 2017 / 13:55

    Question : où trouves-tu tes idées de lectures ? tu présentes souvent des livres originaux dont je n’ai jamais entendu parlé. En tout cas merci d’élargir le paysage de nos lectures éventuelles.

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    • Eva 13 septembre 2017 / 10:38

      Merci beaucoup Marie-Jo pour ce beau compliment.

      Un jour on m’avait offert un livre de l’édition Gallmeister (de Larry Watson) qui m’a beaucoup plu. J’essaie maintenant de découvrir petit à petit cette maison d’édition. C’est comme ça que j’ai trouvé William G. Tapply, je suis d’ailleurs étonnée qu’on ne parle pas plus de lui. Et puis les nouvelles couvertures sont magnifiques !
      Pour d’autres idées de lecture, je papillonne beaucoup et me laisse inspirer un peu partout sur internet ou sur Instagram. J’aime bien la revue Page des libraires. Et puis Patrice est beaucoup plus organisé que moi, avec un carnet et un système tout étudié 🙂

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  3. Violette 1 juillet 2017 / 15:33

    contente que tu aies aimé!!! Je l’ai trouvé vraiment original et prenant. Comme tu dis : pas de point faible! Et la suite existe, attelons-nous-y !

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    • Eva 13 septembre 2017 / 10:37

      J’ai hâte de découvrir la suite, dommage qu’il n’en existe que trois tomes au total.

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