Gerbrand Bakker – Là-haut, tout est calme

Cela fait un petit moment que nous n’avons pas partagé nos lectures, même si, je vous assure, nous n’avons pas arrêté de tourner des pages ! Et aujourd’hui nous vous disons bonjour des Pays-Bas – oui, car si c’était si calme sur le blog et si je peine à lire vos billets et à répondre à vos commentaires, c’est parce que nous avons décidé de changer d’air. Mais maintenant que nos livres sont à nouveau confortablement installés dans leur nouvel univers et que la librairie française la plus proche a été géolocalisée et les salons de thé repérés, je suis contente de pouvoir partager avec vous ma dernière lecture – Là-haut, tout est calme. L’auteur, Gerbrand Bakker, est néerlandais, en guise de clin d’œil à notre pays d’adoption. Mais est-ce vraiment si calme là-haut ?

Helmer van Wonderen s’occupe de la ferme familiale dans la région du Waterland, au nord d’Amsterdam. Si ce quinquagénaire avait d’autres projets dans sa jeunesse, la vie en a décidé autrement. Après le décès tragique de son frère jumeau à l’âge de 20 ans, il prend sur lui l’obligation de gérer l’exploitation familiale et de s’occuper des bêtes. Lui, qui a tout juste commencé des études de littérature et de langue néerlandaises. Lui, qui n’a jamais été véritablement intéressé par les vaches et la traite. Lui, qui était toujours le deuxième, plutôt effacé, réservé, celui qui observait, se cachait d’une certaine façon derrière son frère Henk avec qui il formait un tandem fusionnel.

J’ai donc continué à vivre à la maison ; j’allais à Amsterdam à bicyclette, je suivais des cours et faisais toutes sortes de jobs pour pouvoir payer mes études. Lorsque je m’installais, le matin, à la table de la cuisine, les yeux gonflés parce que j’étais rentré tard la vieille au soir, après avoir déchargé un camion qui effectuait l’approvisionnement d’un grand magasin, maman s’enquérait parfois de mes faits et gestes à Amsterdam. Amsterdam, la ville où mieux vaut ne pas aller. Elle n’avait en fait pas la moindre idée des questions qu’elle allait poser, mais au moins, elle tentait le coup. Papa, jusqu’à ce 19 avril, a dû peut-être me demander trois fois combien j’avais encore appris de mots (sans attendre de réponse), avant de reprendre sa conversation avec Henk. Ils parlaient des vaches qui ne donnaient plus de lait, du changement de pacage des génisses, ou des paysans du voisinage. De choses qui avaient véritablement de l’importance. Pour lui et Henk.

Henk était le paysan, le fils de papa. Quant à savoir ce qu’il voulait faire de moi, ou ce que je voulais faire de moi-même, il ne se posait pas la question.

Mais un jour, Helmer, désormais âgé de 55 ans, commence à changer l’aménagement de la maison, refait les peintures et renouvelle les meubles, tandis que son vieux père ne quitte plus son lit à l’étage. Pourquoi ces changements ? Et puis pourquoi reçoit-il une lettre de Riet, la femme qui était autrefois la fiancée de Henk ?

Les journées de Helmer passent doucement, comme l’eau dans les watergangs, mais les eaux y sont troubles. Au fil des pages, on accompagne cet homme dans son quotidien à la ferme entouré de ses animaux et passons en revue ses années écoulées. Ses sentiments, ses regrets, ses rêves… Comment se reconstruire quand une partie de nous-mêmes part subitement ? Comment s’expliquer avec un père quand il ne lui reste que quelques semaines à vivre ? Et s’il avait raté sa vie ? Et comment continuer quand il ne restera que lui ?

« Je peux n’importe quand », dit Riet, et ces mots éclipsent tout le reste. Je vois le vide dans lequel elle est, et, en même temps que ce vide, je vois le mien.

Un livre poétique et assez triste qui marque par sa sensibilité et que je vous conseille

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lire autre chose

Là-haut, tout est calme de Gerbrand Bakker. Folio, 2011. 384 pages.

16 réflexions sur “Gerbrand Bakker – Là-haut, tout est calme

  1. Luocine 3 septembre 2017 / 21:20

    Quel tristesse de faire ce dur métier sans l’avoir choisi.

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    • Eva 13 septembre 2017 / 11:08

      Je suis d’accord avec toi. Enfin dans ce livre, la réponse sur « raté ou pas raté la vie » n’est pas si évidente, mais je retiens surtout la tristesse, c’est vrai.

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  2. dominiqueivredelivres 5 septembre 2017 / 15:03

    lu lors de sa sortie c’est un roman que j’ai beaucoup aimé, j’ai aimé surtout ce paysage de nuages et d’eau

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    • Eva 13 septembre 2017 / 11:09

      oui, les descriptions des paysages ou des passages où l’on voit les environs à travers les yeux de Helmer (les bêtes, la maison…) sont très beaux et créent une ambiance très poétique.

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  3. mjo 5 septembre 2017 / 21:53

    Un roman que je lirai entre deux nouveautés de cette rentrée littéraire. Bien à vous aux Pays-Bas !

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    • Eva 13 septembre 2017 / 11:09

      Merci beaucoup, Marie-Jo 🙂

      J’espère que le livre te plaira. Il se marierait très bien avec l’automne qui arrive en tout cas. Je suis curieuse de voir comment tu jugerais la vie de Helmer.

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  4. walachniewicz 28 novembre 2017 / 21:21

    Je l’ai beaucoup aimé ce livre et j’ai lu le suivant, le Détour, où il est question d’une femme en fuite et d’oies, sombre mais puissant ! Bravo pour vos photos mise en scène ;o)

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