Il n’est certainement pas nécessaire de présenter Irène Némirovsky, dont le livre le plus connu reste la Suite française. Sur les étals d’une librairie, Patrice a choisi pour moi Chaleur du sang. Le résultat ? Je suis tombée sous le charme de l’écriture et je pense que je ne vais pas tarder à découvrir petit à petit d’autres titres ! Mais revenons d’abord vers l’énigmatique Silvio, Hélène et François…
Hélène et sa famille me font l’effet de vin de dessert, muscat ou frontignan doré que mon palais habitué au vieux bourgogne ne sait plus goûter.
Ce roman fut publié pour la première fois en 2008, plus de 60 ans après l’assassinat de l’auteure à Auschwitz, les parties manquantes du manuscrit n’ayant été retrouvées qu’en 2005. L’histoire se situe en Bourgogne, à Moulin-Neuf, dans les années trente. Dans ce roman aux descriptions très naturalistes, le lecteur se retrouve immédiatement propulsé dans l’ambiance de cet endroit. Les forêts et l’odeur des arbres, les champs, les changements de saison, les bourgs, la lourdeur des meubles, la pénombre… On est convié chez le mystérieux Silvio – on dirait un vieux loup assagi qui a vécu maintes choses et qui cause au coin du feu. Seul, avec un verre de bourgogne à la main, pas vraiment aigri, il a néanmoins compris la nature des hommes et ne se fait aucune illusion.
Aujourd’hui, je suis seul ; la première neige est tombée. Ce pays, au centre de la France, est à la fois sauvage et riche. Chacun vit chez soi, sur son domaine, se méfie du voisin, rentre son blé, compte ses sous et ne s’occupe pas du reste. Pas de châteaux, pas de visites.
Silvio nous relate alors l’histoire de François et Hélène Erard, un couple qu’on qualifierait de modèle, et de leur fille Colette. Cette dernière épouse Jean Dorin, mais l’avenir doré auquel tout le monde s’attend est cruellement interrompu. Jean se noie dans des circonstances qui soulèvent des questions.
Avec la voix de quelqu’un qui regarde en arrière plutôt que vers l’avant, Silvio nous retranscrit ces instants dans la jeunesse où le sang s’échauffe, où la chaleur monte aux joues, où la raison fait place aux instincts, aux désirs et à la passion… et où parfois tout s’écroule.
Je jouis de choses simples et qui sont à ma portée : un bon repas, un bon vin, ce carnet où je me procure, en y griffonnant, une joie sarcastique et secrète ; par-dessus tout la divine solitude. Que me faut-il de plus ? Mais, à vingt ans, comme je brûlais ! … Comment s’allume en nous ce feu ? Il dévore tout, en quelques mois, en quelques années, en quelques heures, parfois, puis s’éteint. (…) Qui n’a pas eu sa vie étrangement déformée et courbée par ce feu dans un sens contraire à sa nature profonde ? Si bien que nous sommes tous plus ou moins semblables à ces branches qui brûlent dans ma cheminée et que les flammes tordent comme elles veulent (…)
Avec un langage simple, mais admirablement précis, Némirovsky livre ici un délicieux portrait de la nature humaine, de son évolution au fur et à mesure que l’âge avance. On dirait presque une enquête où l’on découvre progressivement les secrets de chacun, des secrets bien enfuis, car chacun veut à tout prix éviter les scandales. Ici, ce qu’on veut surtout, c’est qu’on nous laisse tranquilles…
(…) si on connaissait d’avance la récolte, qui sèmerait son champ ?
Avec l’arrivée de l’automne, je pense que je ne peux vous recommander un meilleur roman que celui-ci. Un petit verre de bourgogne, et votre bonheur est assuré. Et la fin du roman ? Je l’ai trouvée exquise !
Il y a un moment de perfection quand mûrissent toutes les promesses, que tombent enfin les beaux fruits, un moment que la nature atteint vers la fin de l’été, qu’elle dépasse bientôt, et alors commencent les pluies de l’automne. Il en est de même pour les gens.
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Chaleur du sang de Irène Némirovsky. Folio, 2008, 208 pages.
j’aime bien cette auteurs, en voilà un que je n’ai pas lu
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Il ne faut pas hésiter !
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j’adore cette écriture moi aussi et je ne connais pas ce titre, me voilà curieuse!!!
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N’hésite pas !
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J’ai suivi ton conseil et j’ai lu le roman. Magnifique écriture et que de secrets ! J’ai relu ton billet avec délectation, car tellement bien senti. Merci !
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Je suis vraiment heureuse que le livre t’ait plu ! L’écriture est très belle et il y a une telle ambiance ! J’ai hâte de lire un autre de ses romans.
Merci pour ton retour 🙂
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J’adore… Je vais le lire cette année!
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Je termine la lecture de ce roman après avoir lu Suite française et Le vin de solitude.
C’est un roman incroyable que j’ai découvert suite à ce votre commentaire à Madame.lit
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Bonsoir, merci beaucoup pour votre commentaire auquel je réponds avec un délai de quelques mois… (je suis vraiment désolée).
Je suis ravie que vous ayez aimé ce roman comme moi – quel beau texte, je suis d’accord avec vous ! Il passe un peu inaperçu, dans l’ombre de La suite française, et c’est fort dommage. Je relis à l’instant les quelques extraits que j’ai mis dans mon billet et j’ai tout de suite envie de le relire. Je trouve que le livre s’accorde parfaitement avec l’automne, certains passages sont délicieux…
Au plaisir de partager d’autres lectures avec vous.
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