Oleg Ermakov – Le cantique du Toungouse

ErmakovEn cette période de confinement, je voulais vous proposer, pour clore cette édition du Mois de l’Europe de l’Est 2020 (non, ne pleurez pas…), une échappée vers les grands espaces. La cantique du Toungouse d’Oleg Ermakov nous emmène en effet près du lac Baïkal en Sibérie, où un homme, Mischka Maltchakitov, tente d’échapper à ses poursuivants dans la forêt. Course poursuite mais aussi voyage à travers l’histoire du jeune homme, représentant d’un peuple, les Evenks.

Durant ce mois de mars consacré à la littérature d’Europe Centrale et Orientale, j’ai lu plusieurs commentaires de blogueurs regrettant de ne pas connaître davantage la littérature russe contemporaire. Or, au cours de ce mois de mars, nous avons déjà pu découvrir des écrivains actuels, comme Andréi Guélassimov, Victor Demizov, ou encore Dmitri Lipskerov. Oleg Ermakov s’ajoute à cette liste. Né en 1961, il travailla tout d’abord comme forestier dans une réserve près du lac Baïkal. Son service militaire en Afghanistan sera à l’origine de deux de ses ouvrages, et plus récemment, c’est à la nature sibérienne qu’il se consacre à nouveau.

Le cantique du Toungouse est scindé en 3 parties distinctes. Dans la première, on apprend que Mischka Maltchakitov s’est évadé de prison pour retourner chez lui, à proximité du lac Baïkal. A écouter les confidences de certains poursuivants, on comprend que la culpabilité de Mischka n’est pas garantie (on cherchait en fait un coupable à un incendie ayant causé de nombreux dégâts). Poursuivi, puis capturé et considéré comme mort, il disparaît mystérieusement et les traqueurs se mettent à nouveau à sa recherche. 70 pages très séduisantes, partagées entre cette traque et cette odeur de forêt perceptible pour le lecteur, au terme desquelles Mischka est retrouvé au village, vivant.

La seconde partie s’attache à revenir sur la vie de Mischka. Il fait partie de la tribu des Evenks, il est donc un des derniers Toungouse habitants près du lac. Il est élevé par son oncle, sa tante, et sa grand-mère Katè, qui a eu une grande influence sur lui (et dont les « petites chansons » parsèment le récit) :

Mischka lui traduisait le tout en langage ordinaire, et la grand-mère lui disait s’il avait vu juste ou non. Elle était farfelue, bien sûr énéké Katè, avec ses yeux noirs , ses doigts noueux, sa face de bronze creusée de rides qui, d’une certaine façon, faisait penser à cette vieille lampe à pétrole, là, avec aussi son sourire chaleureux et ses contes pleins de douceur.

C’est de cette vie quotidienne dans les grands espaces dont il est question : la pêche, un accident de ski, ou encore une tentative de tuer un renne blanc (dans une scène très forte) qui ôte à Mischka l’idée de devenir braconnier. Etudiant ensuite à Irkoutsk, il fuit l’école et repasse dans le village où vivaient ses parents avant de mourir. On s’attache ainsi à ses habitants vivant dans des conditions climatiques difficiles, et bien sûr à l’attraction que cette région exerce sur le jeune homme.

Enfin, vient la troisième partie… que je ne vous raconterai pas. En effet, j’ai complétement perdu pied dans le récit, égaré par les différents personnages et les messages que voulait passer l’auteur. Qu’est-il advenu de Mischka, envoyé par avion dans un hopital après la « traque » ? C’est ce qui m’a retenu à aller jusqu’au bout, mais rarement ai-je été aussi désemparé par un récit qui, jusque là, m’avait beaucoup séduit. A qui la faute? Au livre lui-même, ou à mon manque d’attention ? Toujours est-il que cette lecture m’a déçu, mais pas au point de me convaincre à détourner de potentiels lecteurs.

Au final, je vous conseillerais plutôt :

l’acheter chez votre libraire

X de l’emprunter dans votre bibliothèque

X ou de lire autre chose (et c’est peut-être une erreur…)

La cantique du Toungouse, de Oleg Ermakov, traduit du russe par Yves Gauthier. Editions des Syrtes, 2020, 352 pages.

Ce livre a été lu dans le cadre du Mois de l’Europe de l’Est d’Eva, Patrice et Goran.

20 réflexions sur “Oleg Ermakov – Le cantique du Toungouse

  1. Livr'escapades 31 mars 2020 / 09:48

    Malgré ton bémol sur la troisième partie, je le note quand-même car les deux premières parties me semblent en revanche très intéressantes! J’aime bcp le nature writing (et les éditions Gallmeister!) et je suis curieuse de découvrir une version russe.

    Merci pour votre belle initiative! J’ai été ravie d’y participer enfin et je me joindrai de nouveau avec grand plaisir à vous l’année prochaine! Il me tarde maintenant de lire le bilan, ma wishlist est déjà prête 😉

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    • Patrice 31 mars 2020 / 21:19

      Je comprends et c’est la même raison qui m’a poussé à le lire. Un grand merci pour ton commentaire ; ça a été un grand plaisir pour nous de découvrir autant de belles contributions durant ce mois de mars. On va s’attaquer au bilan, encore une semaine à attendre 🙂

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  2. Ingrid 31 mars 2020 / 11:34

    De mon côté je passe, dissuadée par ton bémol, et tant pis si c’est une erreur, je vais plutôt me concentrer sur les titres suscitant un franc enthousiasme ! Il y a une coquille dans ton billet, tu as mis 2021 au lieu de 2020, déjà pressé de rempiler l’année prochaine ?! Je comprends, moi aussi… mercie en tous cas à vous 3 pour cette activité vraiment très riche, qui permet de découvrir des lectures originales..
    Ingannmic

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    • Patrice 31 mars 2020 / 21:20

      Oui, merci pour la remarque. Eva me l’a dit après la publication, j’ai changé entre temps. Tu raison, j’étais déjà partant pour 2021 :-). Et merci à toi surtout pour ta participation active avec de très jolies découvertes !

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  3. Marilyne 31 mars 2020 / 13:42

    Alors sans regret. J’ai eu ce livre entre les mains au début du mois, j’ai hésité, et puis j’ai laissé passer. Ton billet répond à mes questions. Je relirai plutôt Andreï Guélassimov ( même si je ne favorise pas la littérature russe pendant ce mois à l’Est, préférant découvrir celle des autres pays, moins présente souvent, hors ce mois de l’Europe de l’Est ).

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    • Patrice 31 mars 2020 / 21:21

      Je comprends. Je ne voulais pas trop chroniquer de littérature russe non plus cette année et puis finalement, c’est le pays le plus représenté cette année !

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    • Patrice 1 avril 2020 / 20:01

      Bienvenue sur notre blog ! Merci à toi et n’hésite pas à participer à l’édition 2021. Et si la littérature de langue allemand t’inspire, nous organisons un mois thématique en novembre ! A très bientôt. PATRICE

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  4. Passage à l'Est! 1 avril 2020 / 13:49

    Ce que tu dis sur la traque, et le lien avec des peuples autochtones, et la structure un peu inhabituelle, me fait penser à l’Archipel d’une autre vie, d’Andreï Makine, que j’ai lu ce mois-ci. Un livre que j’ai beaucoup aimé. Sur les Evenks, je te recommande aussi très fortement – si tu ne connais pas déjà – Le dernier quartier de lune, de Chi Zijian! J’ai hâte de voir le bilan, mais je sais déjà qu’il sera très riche en belles découvertes.

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    • Patrice 1 avril 2020 / 19:55

      Je viens de voir ta chronique. C’est une belle suggestion de lecture, en effet, de même que celle de Chi Zijian, que je ne connaissais pas du tout (il est vrai que mes connaissances en matière de littérature chinoise sont limitées…). Oui, je crois qu’il s’agira d’un beau bilan. Il y a eu des contributions très variées et de grande qualité (et du reste, je vois de plus en plus certains blogueurs chercher l’inspiration sur ton blog :-))

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  5. Claudine Frey 1 avril 2020 / 18:04

    Et oui, c’est fini et je n’ai pas eu le temps de rédiger le dernier sur Tolstoï : le diable . Je m’en suis plutôt tenue aux classiques russes quant à moi mais j’ai eu tout de même un coup de coeur pour Olga Tokarczuk, prix Nobel, polonaise.

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    • Patrice 1 avril 2020 / 20:00

      Je pense que c’était une très bon idée d’aller sur le terrain des classiques russes. J’ai trouvé très intéressantes tes contributions sur les romans liés au nihilisme russe, j’ai beaucoup appris ! Quant à Olga Tokarczuk, elle a été souvent lue ce mois-ci et c’est une bonne chose – un des mérites du Nobel ! Tu peux garder Tolstoï pour l’an prochain 🙂

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  6. laboucheaoreille 3 avril 2020 / 14:45

    C’est bizarre que la troisième partie soit si décevante alors que les deux tiers te plaisaient … dommage.
    J’attends le bilan du Mois de l’Europe de l’est avec beaucoup de curiosité, je sens que ça va être passionnant …

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    • Patrice 7 avril 2020 / 04:39

      Merci, on prévoit de publier le bilan ce mercredi 8, plus que quelques heures à attendre 🙂

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