
La promenade est un thème récurrent de notre mois thématique Les feuilles allemandes. C’est en effet une véritable promenade que nous avons pu faire à travers la littérature de langue allemande, qui nous mena à travers l’Autriche, la Suisse et l’Allemagne. Pour certain(e)s, le pas a été léger, pour d’autres, une canne a été nécessaire ! Soulignons de plus que dans l’un de nos coups de cœur de ce mois, Gloire tardive, d’Arthur Schnitzler, le personnage principal était lui-même l’auteur d’un livre unique, Promenades, à l’origine de toute la trame du récit. Et c’est avec La promenade, de l’écrivain suisse Robert Walser, que l’on clôt ce mois thématique !
Un matin, l’envie me prenant de faire une promenade, je mis le chapeau sur la tête et, en courant, quittai le cabinet de travail ou de fantasmagorie pour dévaler l’escalier et me précipiter dans la rue. Dans l’escalier, je fus croisé par une femme qui avait l’air d’une Espagnole, d’une Péruvienne ou d’une créole, et qui affichait quelque majesté pâle et fanée.
La promenade est en fait l’histoire d’un homme qui, un matin, décide d’aller se promener. Il se rend dans une librairie, fait quelques rencontres, va honorer une invitation à déjeuner ou encore des rendez-vous chez son tailleur ou le directeur des impôts. Comme l’illustre le premier exemple, l’un des grands attraits de ce petit livre, qui s’apparente davantage à une nouvelle qu’à un roman, et dont la matière est finalement assez réduite, réside dans le style. Des descriptions très fines, précises, utilisant une succession d’adjectifs ou de verbes, ou encore des oxymores. Walser se lance dans de grandes disgressions, notamment quand il salue deux jeunes femmes qui ont selon lui le talent de chanteuse ou d’actrice, ou encore quand il tente d’expliquer pourquoi il ne doit payer que le minimum d’impôts.
Ce faisant, on imagine assez facilement que ce promeneur n’est autre que Walser lui-même, grand amateur de promenades, écrivain anxieux de ne pas trouver de lecteurs pour ses ouvrages, écrivain qui fait sa propre introspection et voit le temps qui passe, regrettant d’avoir laissé filé l’amour. Au final, le récit alterne avec brio entre des moments graves et d’autres plus légers, et l’on tourne les pages avec l’assurance d’avoir découvert un auteur de grand talent.
Je vous offre un dernier extrait…
Tandis que tu prends la peine, cher lecteur, d’avancer à pas compris, en compagnie de l’inventeur et scripteur de ces lignes, dans le bon air clair du matin, sans hâte ni précipitation, mais de préférence d’une façon tout à faire propre, bonhomme, objective, posée, lisse et tranquille, voilà que nous arrivons tous deux devant la boulangerie déjà signalée, avec sa prétentieuse inscription dorée, et nous nous arrêtons, atterrés, enclins que nous sommes tant à l’affliction profonde qu’à la la stupeur sincère devant cette grossière esbroufe et le gâchis qu’elle entraîne du même coup aux dépens d’un paysage qui nous est des plus chers.
… et vous conseille donc de découvrir ce livre :
X en l’achetant chez votre libraire
X en l’empruntant dans votre bibliothèque
en lisant autre chose
La promenade, de Robert Walser, traduit de l’allemand par Robert Lortholary. Gallimard, 2019. 118 pages
Si vous souhaitez découvrir l’oeuvre de Walser, je vous renvoie également à un article publié l’an dernier dans le cadre des Feuilles allemandes : Retour dans la neige, de Robert Walser (blog « Dans la bibliothèque de Cléanthe »).

Ce livre a été lu dans le cadre des Feuilles allemandes, consacrées à la littérature de langue allemande.
Bonjour fais Et est pour moi un des plus grands auteurs. Je le lis surtout l hiver…
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Oui, je dois avouer que cela a été pour moi une heureuse découverte
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Robert Walser, c’est un écrivain que je souhaite découvrir depuis quelques temps déjà, content de le retrouver ici…
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Merci Goran, et je pense qu’il est susceptible de revenir l’an prochain dans le cadre des Feuilles allemandes.
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Je pense que moi je le lirais pour la nouvelle saison 😉
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Je n’ai lu que « Les enfants Tanner » de cet auteur incontournable, que j’avais beaucoup aimé. Je pense que celui-ci me plairait aussi..
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Merci pour cette suggestion de lecture !
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Il me semble avoir lu un texte…
Mais pour l’instant je suis avec Sebald, et ça pourrait entrer dans les feuilles allemandes, non?
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Oui, Sebald rentre tout à fait dans ce cadre.
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un auteur et un livre que j’aime beaucoup et qui touche particulièrement quand on connais la fin de l’écrivain dans la neige un jour de promenade !
je te recommande de lire Promenade avec Robert Walser de Karl Seelig un petit livre que l’on trouve en poche
http://asautsetagambades.hautetfort.com/archive/2018/12/29/bribes-de-promenades-6116610.html
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Merci beaucoup Dominique. Je me souviens d’avoir lu ton billet à l’époque ; très belle suggestion de lecture en effet !
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J’aime énormément Walser ! Et je lis justement en ce moment un de ses livres, « Retour dans la neige », des petites proses très poétiques.
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Je note ce titre aussi !
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Déjà noté, mais pas encore partie en promenade avec lui.
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Ca ne saurait tarder alors ?
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