Andreï Guelassimov – La soif

Place aujourd’hui à la littérature russe contemporaine ! Andreï Guelassimov est un auteur né en 1965, dont l’oeuvre est publiée en France chez Actes Sud. La soif est son second roman. Il y raconte l’histoire de Kostia, un jeune soldat revenu de Tchétchénie avec le visage brûlé, qui noie son mal de vivre dans l’alcool jusqu’à ce que…

« Je n’avais pas réussi à caser toute la vodka dans le frigo. J’avais d’abord essayé de poser les bouteilles debout, puis je les avais couchées les uns sur les autres. Elles ressemblaient comme ça à des poissons transparents. Tapis et silencieux. Mais je n’avais plus de place pour les dix dernières ».

Ainsi débute La soif. En l’espace de quelques lignes, Andreï Guelassimov plante le décor sans détour. Kostia, le narrateur du livre, s’est réfugié dans l’alcool. Sa vie sociale : une voisine, Olga, qui fait appel à ses services pour obliger son jeune fils à aller dormir. Comment ? Seulement en montrant son visage mutilé à la suite de l’explosion de son tank en Tchétchénie :

Ca fait que maintenant je n’étais plus bon qu’à faire peur aux gosses. Elle avait eu du pot, Olga, avec son voisin.

Mais un jour, Sérioja disparaît. Sérioja est son ancien capitaine, celui qui l’a sorti du char après l’explosion :

Si seulement Sérioja ne s’était pas trompé et ne m’avait pas laissé cramer dans le véhicule blindé. Mais il pensait qu’il n’y avait plus rien à faire pour moi. C’est pour ça qu’il avait d’abord dégagé tous les autres. Tous ceux qui bougeaient encore. J’étais le dernier.

Commence alors une expédition à travers la Russie avec Guéna et Pacha, deux de ses anciens camarades de Tchétchénie. Si Sérioja a disparu, Kostia se métamorphose peu à peu, retrouvant le goût du dessin, sa véritable passion. A la soif d’alcool se substitue une réelle soif de vivre, et les blessures, notamment celles de l’enfance, se referment.

Andreï Guelassimov s’exprime dans un style précis, concis, dans ce récit court (120 pages) qui pourrait presque s’apparenter à une nouvelle. Sautant parfois de sujet lors d’un simple changement de phrase, il donne une réelle tension à l’histoire ; il rend palpable au lecteur les changements qui se passent chez Kostia. Un vrai talent narratif.

J’ai lu beaucoup de commentaires enthousiastes sur cet ouvrage et je les comprends, même si, à titre personnel, il m’a manqué peut-être quelque chose. Etant plus adepte des proses plus « bavardes », il m’aurait fallu probablement sentir davantage l’arrière plan, notamment ce voyage à travers la Russie. Il n’en demeure pas moins un bon roman que je vous conseille

X d’acheter chez votre libraire

X d’emprunter dans votre bibliothèque

de ne pas lire

La soif d’Andreï Guelassimov, traduit du russe par Joëlle Dublanchet. Babel Actes Sud, 2006, 126 pages.

 

5 réflexions sur “Andreï Guelassimov – La soif

  1. Goran 26 novembre 2017 / 13:52

    Quelle coïncidence, il y a quelques jours, j’ai ajouté ce livre sur ma liste de livres à lire… Sinon, mardi j’écris sur un livre slovaque 🙂

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    • Patrice 26 novembre 2017 / 20:49

      Et en parlant coïncidence, mon épouse me disait justement que ce livre pourrait t’intéresser, quelques secondes avant que ce message ne s’affiche ! Vivement mardi alors 🙂

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  2. tempsdelectureblog 8 mars 2018 / 17:01

    Je viens de finir « L’année du Mensonge » de Guelassimov et le ton de ce vraiment diffère vraiment de « La Soif » apparemment: en bref, c’est l’histoire d’un jeune paumé Micha, à qui un homme d’affaire demande de s’occuper de son fils. C’est très léger et drôle, ça m’a d’ailleurs surprise parce que j’avoue ne pas avoir l’habitude d’un ton aussi informel en littérature russe! Je pense que je lirai celui-ci à l’occasion, histoire de voir ce que donne le style de Guelassimov à travers une narration plus grave.

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    • Patrice 10 mars 2018 / 13:52

      C’est surprenant en effet, j’ai hâte de lire ton commentaire sur ce livre ; il m’a manqué quelque chose pour véritablement apprécier La Soif, mais je suis heureux de découvrir ainsi la littérature contemporaine russe.

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