Ivan Chmeliov – Garçon !

chmeliov

Après bientôt deux années d’existence de ce blog, je fus récemment surpris par l’absence d’auteur russe dans la liste des chroniques rédigées. Grâce aux bons conseils d’une amie qui m’a glissé ce livre parmi ses chaudes recommandations, je vous propose donc aujourd’hui le premier roman russe de la liste : Garçon ! d’Ivan Chmeliov. L’occasion pour moi de découvrir un bon roman et un auteur qui m’était jusqu’alors inconnu.

Faisons tout d’abord, si vous le voulez bien, plus ample connaissance avec l’auteur. Ivan Chmeliov est né en 1870 à Moscou dans une famille de marchands. Garçon ! est son premier roman couronné de succès en 1911. S’il est favorable à la première révolution menée par les mencheviks en février 1917, il s’oppose à celle d’octobre. Réfugié en Crimée, où il souffre de la faim, il se résoudra à l’exil en France après que son fils unique fut fusillé par les bolcheviks en 1923 ; une histoire qu’il relatera dans son oeuvre la plus célèbre, Le soleil de la mort. Il demeurera en France jusqu’à sa mort en 1950.

Dans la très jolie préface de cette édition, Henri Troyat nous précise que « toute son oeuvre sera placée sous le signe de la mystique orthodoxe et de l’amour des petites gens ». C’est exactement l’univers qui caractérise Garçon !. Le narrateur habite avec sa femme, ses deux enfants et deux locataires dans un appartement de Moscou ; il est serveur dans un restaurant. De cet établissement, le lecteur découvre une société en pleine mutation, comprenant des classes en cours d’enrichissement :

Pendant le service des déjeuners, un de nos clients, Mikhaïl Loukitch Siomine, me fit bien rire. Un bon exemple de ce que peut le capital, ce Siomine ! C’est même incompréhensible ! Naguère apprenti chez un emballeur, il a fait une carrière étonnante. Il bâtit maintenant des maisons à effrayer tout le monde : des sept ou huit étages avec cent appartements, et les hypothèque aussitôt avec un gros bénéfice. Puis il recommence. De cette manière, il a édifié six immeubles. Aucune instruction, mais roublarb en diable.

Le roman ouvre ainsi sur plusieurs fenêtres : la haute société et ses habitudes parfois répréhensibles, les agitations de l’époque (le récit se passe en 1905, la période de la première révolution russe, dans laquelle Koliouchka, le fils de notre serveur, sera impliqué), la condition modeste des employés. On s’attache à la personnalité du « garçon » , Skorokhodov, qui devra faire face aux vicissitudes de l’histoire et les acceptera avec courage, sans chercher à se rebeller, pétri par la foi et le sentiment que toutes les épreuves ont un sens :

Tes larmes n’y changeront rien, c’est la volonté de Dieu…

Le style de Chmeliov nous rend perceptible avec beaucoup d’acuité l’ambiance du restaurant, la vie des gens, leur caractère. Une belle introduction à l’oeuvre de Chmeliov, malheureusement peu traduite en français ; par conséquent, je vous conseille :

de l’acheter chez votre libraire

X d’emprunter ce livre dans votre bibliothèque

de lire plutôt autre chose

Garçon de Ivan Chmeliov, traduit par Henri Mongault. Actes Sud, 1993, 278 pages.

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