
Némésis est le dernier roman écrit par l’écrivain américain Philip Roth, en 2010. Il décrit l’éruption d’une épidémie de polio dans la ville de Newark, New Jersey, d’où est lui-même originaire l’auteur. Eugène « Bucky » Cantor, un jeune homme de 23 ans, est professeur d’éducation physique et s’occupe d’un camp de vacances dans la ville, jusqu’à ce que l’épidémie éclate…
Némésis fait l’objet d’une lecture commune « Autour du handicap »
Le livre est scindé en 3 grandes parties : les deux premières s’enchainent durant l’été 1944 tandis que la troisième est écrite quelques décennies plus tard et revient sur le personnage principal, Eugène Cantor, surnommé « Bucky », un jeune juif de Newark. Ne souhaitant pas dévoiler l’issue du livre, je vais m’évertuer ici à vous donner quelques raisons de le lire, car je dois avouer que, grâce une nouvelle fois à une lecture commune, il m’a été donné de découvrir un titre que je n’aurais pas lu de prime abord.
La première raison pour laquelle le livre m’a plu réside dans le personnage principal, Bucky. Elevé par ses grands-parents après le décès de sa mère en couches et la condamnation de son père pour vol, celui-ci aurait pu « mal tourner ». Doté d’une vue médiocre mais d’une grande capacité physique, il veut, comme ses amis, aller se battre pour délivrer l’Europe de l’occupation nazie, mais il est réformé et cela le hante profondément. Il n’en demeure pas moins qu’il se consacre corps et âmes à l’encadrement des jeunes enfants. Bucky est un homme de parole, de devoir, façonné par son grand-père et Philip Roth nous en livre un joli portrait :
Quand un devoir s’imposait à lui, il fallait qu’il s’en acquitte, et son devoir actuellement c’était de s’occuper des enfants en danger qu’on lui avait confiés. Et il fallait s’en acquitter, non seulement pour les enfants, mais pour honorer la mémoire de l’épicier tenace qui, avec son énergie bourrue, et malgré ses limites, avait toujours rempli chacun des devoirs qui s’étaient présentés à lui.
Lorsque les premiers cas de polio sont déclarés, mais aussi les premiers décès parmi les enfants qu’il accompagne, il va à la rencontre des familles, assiste aux funérailles, et garde une grande disponibilité pour tous. C’est lui qui est le fil rouge de roman jusqu’à la dernière page… lui et la polio.
Pour un Européen vivant au XXIème siècle, la polio semble se résumer à l’une des vaccinations reçues pendant l’enfance. Néanmoins, à la lecture de ces pages, on prend conscience des conséquences de cette maladie infectieuse : certes, dans la plupart des cas, les personnes touchées en réchappent et n’en gardent pas de séquelles, mais la mort ou des conséquences physiques à vie peuvent en résulter. Témoin en est le terme de « poumon d’acier », une invention faite aux Etats-Unis pour apporter une assistance respiratoire aux malades, de quelques jours… à toute la vie. A lire ces lignes, on perçoit à quel point la vaccination, une nouvelle fois, a été salvatrice.
J’ai ainsi redécouvert ce qu’était cette maladie mais ce n’est pas tout. Philip Roth restitue l’ambiance qui accompagne l’épidémie. Un adolescent calme et solide perd ses nerfs, pleure et s’emporte contre une personne qu’il soupçonne d’être porteur ; une mère de famille devient hystérique quand elle voit Bucky maintenir les exercices sur le terrain de sport. Le manque de connaissance sur les conditions de transmission de la maladie alimentent les peurs. Les sirènes des ambulances qui hurlent durant cet été caniculaire de 1944 retentissent à nos oreilles.
Enfin, à côté du portrait de Bucky, de la façon d’aborder la maladie et de l’ambiance du livre, un quatrième aspect m’a beaucoup plu : c’est la façon dont sont abordés ces « accidents » qui peuvent frapper n’importe qui dans une vie, et la façon dont les personnes touchées peuvent réagir. C’est le sujet de la troisième partie qui, vous vous en doutez, traite également du handicap…
Une lecture qui m’a beaucoup plu au final. J’espère qu’il en est de même pour celles et ceux qui m’accompagnent pour cette lecture commune.
Je vous conseille donc :
x d’acheter le livre chez votre libraire
x de l’emprunter dans votre bibliothèque
de lire autre chose
Némésis, de Philip Roth, traduit de l’anglais (américain) par Marie-Claire Pasquier. Gallimard Folio, 2020. 266 pages.
Je lirai certainement ce roman un jour car j’apprécie beaucoup Philip Roth et que ta chronique m’a convaincue ! Merci ! Bonne journée
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Merci beaucoup ! Pour moi, cela a été une presque découverte car je n’ai dû lire qu’un livre de Philip Roth il y a très longtemps. Mais c’était un oubli et je serai heureux de continuer à le lire à l’avenir.
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Un livre que j’ai lu et commenté avec un grand plaisir ( https://www.babelio.com/livres/Roth-Nemesis/312321/critiques/1171713 ) et qui m’a donné envie d’en lire d’autres de cet auteur que je ne connaissais pas. La chronique rend très bien compte du livre et des questions qu’il ouvre. Merci.
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Je viens de lire ta chronique et je la trouve vraiment passionnante ! Tu y poses de très nombreuses questions, de façon très juste. Je suis dans le même cas de figure que toi, cette lecture m’a vraiment envie de continuer à découvrir l’oeuvre de Philip Roth ! Merci pour ce commentaire !
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Je suis ravie de la lecture commune, même si elle s’est soldée pour moi par une déception, peut-être parce que, en tant que fan de cet auteur, j’en attendais beaucoup ?
Pour autant, le sujet (les réactions face à l’épidémie et l’évolution psychologique de Bucky Cantor, notamment) m’a intéressée, et tu as raison de souligner dans ton billet la manière dont sont abordées les conséquences de la maladie sur l’individu >> je ne savais pas comment évoquer ce point sans déflorer l’intrigue du coup j’ai un peu botté en touche .. mais tu l’as très bien fait de ton côté !
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Il est vrai que j’avais sûrement des attentes inférieures aux tiennes :-). Au bout de quelques pages, le charme a opéré et je dois dire que cette lecture m’a beaucoup plu. Je suis très heureux que tu aies participé à cette LC, un grand merci à toi !
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Lu il y a longtemps. Le sujet : l’épidémie m’avait beaucoup étonnée alors. Il revient d’actualité. Un très bon Philip Roth !
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J’ai eu le même ressenti en lisant le livre, il m’a ouvert les yeux sur ce que voulait dire la polio. Une très belle découverte pour moi aussi. Merci pour ton commentaire !
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J’ai dévoré trois Roth à la suite il y a quelques semaines, je pense que je viendrai à ce titre un jour.
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Je l’ai vu et je dois dire que tes billets donnent vraiment envie de lire ses livres ! « J’ai épousé un communiste » figure en première ligne de mon côté.
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Je n’ai lu que « Pastorale américaine » pour l’instant mais compte en lire d’autres, pourquoi pas Némésis?
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Ce n’est pas moi qui vais te réfréner dans ce choix 🙂
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Je n’ai jamais lu cet auteur américain… Ta chronique m’incite à le découvrir car elle est très convaincante. Merci Patrice!
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Merci à toi pour ce commentaire ! Oui, il faut vraiment lire cet auteur, et beaucoup de commentaires vont dans ce sens.
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Dans ce roman j’ai retrouvé des craintes ou des réactions qu’on a pu voir au début de l’épidémie de covid.
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