Ernesto Sábato – Le tunnel

Il suffira de dire que je suis Juan Pablo Castel, le peintre qui a tué Maria Iribarne ; je suppose que le procès est resté dans toutes les mémoires et qu’il n’est pas nécessaire d’en dire plus sur ma personne.

Dès les premières pages du livre d’Ernesto Sabato, le décor est planté. Juan Pablo Castel est un criminel. Même si le personnage principal se défend « d’en dire plus », le lecteur en apprendra beaucoup et visualisera, dans le court récit que constitue Le tunnel, la spirale qui a mené le peintre à commettre ce crime.

A lire ces quelques lignes d’introduction, vous pensez peut-être qu’il s’agit d’un roman qui se rapproche du genre policier. Il n’en est rien ; il s’agit davantage d’une confession, d’une sorte de justification d’un être replié sur lui-même et ses préoccupations.

Revenons au début… Lors d’une exposition dédiée aux oeuvres du peintre Juan Pablo Castel, une jeune femme reste longtemps concentrée sur un élément du tableau : une fenêtre par laquelle une femme observe la mer. Le peintre commence à être obsédée par cette femme qu’il se met en quête de retrouver. Il se livre alors à de nombreuses introspections, et surtout, on comprend dès le début qu’il pense que cette femme va enfin le comprendre, lui qui est privé d’amour et de compréhension :

Soudain, je me repentis d’être allé jusque-là, avec mon habitude d’analyser sans fin faits et paroles. Je me rappelai le regard de Maria fixé sur l’arbre de la place, tandis qu’elle m’écoutait exposer mes idées ; je me rappelai sa timidité, sa première fuite. Et une débordante tendresse envers elle commença à m’envahir. Elle m’apparut comme une fragile créature jetée dans un monde cruel, plein de laideur et de misère. Je ressentis ce que j’avais souvent ressenti depuis le jour de l’exposition : que c’était un être tout semblable à moi.

On apprend finalement que peu de choses sur la mystérieuse Maria ; c’est surtout le peintre qui émet des hypothèses et qui finit par suspecter l’infidélité de sa muse.

Je n’en dirai guère plus, sinon que ce roman est une réussite, en montrant la dérive d’un homme complexe, solitaire, jaloux – tout en ménageant une vraie tension alors que le lecteur connait déjà l’issue fatale.

Je vous conseille donc de découvrir ce livre en :

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lisant autre chose

Le tunnel, d’Ernesto Sabata, traduit de l’espagnol (Argentine) par Michel Bibard. Points, 2021, 160 pages.

Cette lecture s’inscrit dans le cadre du Mois latino.

3 réflexions sur “Ernesto Sábato – Le tunnel

  1. Ingannmic 14 février 2023 / 09:10

    Merci, c’est une belle proposition et un auteur que je ne connais pas du tout. L’Argentine occupe encore une belle place dans ce Mois Latino…

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  2. luocine 14 février 2023 / 10:56

    un livre bien mystérieux et qui ne m’attire pas plus que ça : un homme se justifie d’avoir assassiné une femme ?

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