Et si on bouquinait un peu ?

Jean-Noël reçoit un appel téléphonique de son frère aîné, l’informant que leur père va mal. Quelques jours plus tard, il monte dans sa Peugeot et se met en route vers le sud et vers un passé qui s’est brutalement interrompu il y a une trentaine d’années. Sur à peine 200 pages, Stéphanie Chaillou nous parle de la famille et de ses membres, et signe avec Revenir à Marimbault un de mes coups de cœur de cette rentrée littéraire.

Appelé le petit par ses proches, Jean-Noël est le deuxième des trois enfants Dutilheul. Tandis que son frère aîné a vite donné la priorité à sa bande de copains et que la soeur a grandi comme une petite princesse, l’enfance de Jean-Noël est marquée par la solitude. Il sort du cadre, se démarque des autres et trouve refuge dans la lecture et le dessin, ce qui nuit à l’image que la mère s’est faite d’une famille, celle d’être irréprochable, impeccable comme la blouse de travail qu’elle revêtait tous les jours.

Assis dans le fauteuil crapaud de l’entrée de son appartement, le téléphone portable collé contre la joue, Jean-Noël avait senti son pouls s’accélérer. Ils ne s’étaient pas parlé depuis près de trente ans. Sur sa peau, les poils de ses bras s’étaient redressés. Un picotement la parcourait. Il avait laissé Michel parler. Leur père allait mal. Il devait venir. À ces mots, il avait eu l’impression désagréable que des importuns étaient entrés chez lui. Des corps, des odeurs, des paysages dont il ne souhaitait pas la présence. Mais qui étaient là pourtant. De retour. Qui s’imposaient. D’une phrase polie, il avait remercié son frère. Puis il avait raccroché. Sans rien dire de ses intentions.

Trente ans plus tard, pendant une petite semaine, on emboîte le pas à Jean-Noël, dans les rues de la ville où il passa son enfance, devant sa maison de famille et, dans une ambiance tendue, soutenue par des températures caniculaires, on apprend à connaitre son passé et les circonstances de son départ. En enchaînant des chapitres courts et avec un langage très épuré, Stéphanie Chaillou réussit admirablement à décrire le rejet et l’exclusion, mais aussi le pouvoir de se reconstruire. Poignant et juste.

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Revenir à Marimbault, de Stéphanie Chaillou. Noir sur Blanc, 192 pages, 2025.