Le ravissement des innocents (chez Gallimard) était un de mes coups de cœur de ces derniers mois. Faites vos valises, nous allons voyager ! Des voyages entre Amérique, Afrique et Angleterre, mais aussi dans le temps. Optez plutôt pour un aller, car l’univers de Taiye Selasi va vous séduire. Attachez vos ceintures, nous allons décoller…
Kweku meurt pieds nus un dimanche matin avant le lever du jour, ses pantoufles tels des chiens devant la porte de la chambre.
C’est ainsi que commence le livre: avec la mort de Kweku, un chirurgien réputé d’origine ghanéenne. Alors que sa carrière aux Etats-Unis était au sommet, il fut victime d’une injustice qui allait bouleverser sa vie, détruire tout ce qu’il avait bâti, ses rêves d’un retour triomphant au pays compris, et à jamais influencer la vie de tous les autres membres de famille.
Tout d’abord, il y a Fola, sa femme au passé difficile qui a sacrifié sa vie professionnelle au profit de la famille. Fola en jeans à pattes d’eph. Belle femme, gracieuse, mystérieuse, avec beaucoup de non-dits, qui préfère se taire que de s’exprimer clairement. Une femme qui aura besoin de beaucoup de force car elle devra agir quand Kweku quittera la famille. Et puis Fola avec sa vie intérieure très riche, dont le corps reste d’une certaine façon connecté à ses enfants et lui enverra un signal dès qu’ils souffriront…
L’aîné, c’est Olu. Un garçon brillant, diplômé, celui qui a réussi en Amérique. Il est devenu médecin comme son père avec lequel il se compare toujours inconsciemment. Il est perfectionniste, réservé, comme s’il se contrôlait sans arrêt et paraît sans émotions. Il se comporte ainsi dans sa relation avec Ling. Va-t-il enfin briser le silence ou sera-t-il toujours figé de peur de ne pas abîmer son image parfaite ?
Et puis les jumeaux fusionnels : Kehinde et Taiwo, tous les deux d’une beauté éblouissante. Jeunes, fragiles et livrés à eux-mêmes, ils vivront un cauchemar qui va les marquer à toujours…
La toute petite dernière s’appelle Sadie. Cadette de plus de dix ans de ses frères et soeur, elle n’a pas les mêmes souvenirs, elle n’a même pas très bien connu leur père. Elle est jalouse d’Olu, Kehinde et Taiwo, qui lui semblent tous beaux, talentueux, sans faille, tandis qu’elle se juge comme une fille moyenne sans talent particulier. Va-t-elle trouver sa voie ?
Avec la mort de Kweku, tous les membres de famille vont devoir se remettre en question, se reconstruire. Taiye Selasi donne la parole à chacun d’eux et avec les allers-retours dans le temps, elle nous laisse découvrir petit à petit l’univers de chacun avec ses secrets et ses doutes. Elle pose ainsi plusieurs questions notamment celles de l’éducation, de la réconciliation ou de l’impuissance à lutter contre les événements de la vie ou nos démons.
Les personnages sont très attachants et crédibles, les descriptions très vivantes (surtout celles concernant l’Afrique). N’oublions pas de plus que c’est le premier roman de l’auteure, quelle promesse pour l’avenir ! La sortie de ses prochains livres sera donc à suivre très attentivement.
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Réf.: Le ravissement des innocents de Taiye Selasi, traduit par Sylvie Schneiter, Gallimard, 2014, 365p.
Une réflexion sur “Taiye Selasi – Le ravissement des innocents”