Willem Elsschot – Fromage

elsschot

Le 1 Hebdo consacrait son numéro 201 daté du 9 mars 2018 aux lettres néerlandaises, nous donnant quelques conseils de lecture pour découvrir la littérature néerlandophone. Parmi elles, un classique, Fromage, de Willem Elsschot, nous raconte les malheurs d’un employé de bureau, Frans Laarmans, qui devient représentant pour la Belgique et le Luxembourg d’une entreprise hollandaise de fromage. Ou comment écouler vingt tonnes d’eidam quand on n’a aucune notion du commerce !

Frans Laarmans est un modeste employé de bureau qui se voit proposer pour un salaire double du sien et une commission proportionnelle aux ventes un poste de négociant en fromage. Enthousiasmé par l’offre, notre homme, qui n’aime pas le fromage, accepte tout de suite le poste et se sent gonflé par le statut que celui-ci lui apporte :

Ma femme n’eut pas immédiatement droit à la nouvelle, mais dut prendre patience jusqu’à ce que j’aie soupé. Car dorénavant je ne mangerais plus, mais déjeunerais, dînerais ou souperais.

Notre homme s’empresse d’aménager son bureau, de faire imprimer du papier à lettre ; mais pour cela, il faut trouver un nom à la société, une activité qui lui prend du temps et qui est l’objet de quelques pages très drôles du livre. Willem Elsschot manie l’humour, l’ironie, la dérision avec talent, et même le premier épisode du livre, qui n’a rien de drôle puisqu’il s’agit du décès de sa mère, fait sourire.

Mais peu à peu, sans connaissance du monde des affaires, les vingt tonnes d’eidam demeurent sans acheteur et Frans Laarmans tombe dans la déprime jusqu’à arrêter son nouvel emploi :

Mais alors pourquoi avais-je fait cela ? Je détestais le fromage. Jamais je n’avais désiré vendre du fromage. Déjà, acheter du fromage dans un magasin m’était pénible. Mais errer avec une cargaison de fromages sur les bras et supplier qu’une âme chrétienne m’ôte ce fardeau des épaules, c’était impossible. Plutôt mourir. (…) Tout cela m’était arrivé parce que j’étais d’une nature trop conciliante. Quand Van Schoonbeke m’avait demandé si je voulais le faire, je n’avais pas eu le courage de le repousser, lui et son fromage, comme j’aurais dû. Et pour cette lâcheté, il me fallait payer. Mon épreuve fromagère, je l’avais méritée.

« Cette satire particulièrement savoureuse du monde des affaires est aussi une évocation brillante des années 30. Willem Elsschot, en maître de l’humour froid, observe avec un mélange de compassion et de férocité les faiblesses du genre humain. », peut-on lire sur la quatrième de couverture. En effet, le besoin de confort, de statut, de reconnaissance sont bien saisis ; par contre, j’ai du mal à corroborer le propos sur l’évocation du monde des affaires dans les années 30.

Sans nier les réelles qualités d’écriture de l’auteur, je ressors quelque peu mitigé de cette lecture et déçu par l’histoire, mais je compte bien continuer à explorer la littérature néerlandaise durant cette année 2020 ! Je vous conseille donc de :

l’acheter dans votre librairie

x l’emprunter dans votre bibliothèque

x lire autre chose

Fromage, de Willem Elsschot, traduit du néerlandais par Xavier Hanotte. « Escales du Nord », le Castor Astral. 2003, 156 pages.

12 réflexions sur “Willem Elsschot – Fromage

  1. Goran 6 février 2020 / 16:15

    De mon côté je te conseille un énorme classique hollandais : Max havelaar, de Multatuli. Sinon j’adore Jef Geeraerts (Black Vénus), mais c’est un flamand. J’ai presque oublié Gerard Reve et plus particulièrement son « Parents soucieux ».

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    • Patrice 7 février 2020 / 10:19

      Tu me gâtes, Goran! J’avais noté le Max Havelaar aussi sur la liste, mais les deux autres sont des découvertes, je vais m’empresser d’aller regarder ça de plus près.

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  2. Ingannmic 6 février 2020 / 20:56

    Dommage. Il y a aussi Débâcle de Lize Spit (une claque, cette lecture !) mais c’est une flamande aussi (flamand, c’est néerlandophone ?)…

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    • Patrice 7 février 2020 / 10:24

      Je me souviens de la couverture, mais j’avais oublié le contenu du livre. Ca a l’air absolument passionnant, merci pour ce très bon conseil !

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  3. Madame lit 7 février 2020 / 19:04

    Je connais peu, il me semble, cette littérature. Le titre est tout de même accrocheur. Au plaisir!

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    • Patrice 11 février 2020 / 05:45

      J’espère mettre plus en avant la littérature de langue néerlandaise cette avant, elle est très riche.

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  4. krolfranca 9 février 2020 / 09:59

    Deux critiques sur ce livre, deux avis différents. C’est intéressant. Il ne me reste plus qu’à le découvrir pour me faire ma propre opinion. J’ai un peu de mal avec le cocasse, l’absurde, mais toi tu parles plutôt d’humour, d’ironie, on verra.

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    • Patrice 11 février 2020 / 05:43

      Je suis comme toi ; le côté absurde m’interpelle assez peu, mais je parlerais en effet plutôt du côté humoristique dans ce livre.

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  5. Agnès 9 février 2020 / 12:43

    Si on peut proposer des Belges je suggère Le chagrin des Belges de Hugo Claus.

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    • Patrice 11 février 2020 / 05:43

      Bonne remarque, celui-là est encore bien rangé dans ma bibliothèque, mais je pense que son heure viendra en 2020.

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  6. laboucheaoreille 11 février 2020 / 15:20

    Je ne connais rien aux romanciers hollandais … celui-ci avait l’air plutôt amusant mais le thème est peut-être un peu léger pour captiver vraiment ?

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    • Patrice 20 février 2020 / 07:26

      Je ne dirais pas forcément léger, mais je dois avouer que l’ensemble est un peu décevant

      Aimé par 1 personne

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