En 1964, Audrey Hepburn a déjà derrière elle un grand nombre de succès cinématographiques comme Diamants sur canapé, Guerre et Paix ou encore Vacances romaines… C’est également l’année des retrouvailles avec son père, qui servent de cadre au nouveau livre de Clémence Boulouque, Un instant de grâce, paru chez Flammarion. L’occasion pour le lecteur de partir à la rencontre d’une icône sensible, tourmentée, qui décide d’affronter son passé.
« Dans son regard, elle n’avait trouvé qu’une opacité. Il était engoncé dans une vie qui lui barrait le front en rides sèches, et y plaquait cet air obtus. Il était une figure et une charpente épaisses. Un homme qui lui avait donné son nom, et s’en était allé un jour de mai 1935, sans raison. (…) Mais le revoir avait désavoué ses rêves, éteint les phrases dites en silence. »
C’est par ces très jolies phrases que Clémence Boulouque nous fait découvrir le père d’Audrey Hepburn, une sorte d’aventurier qui quitta le foyer conjugal et se laissa séduire par l’idéologie nazie. Un homme dont l’absence pesa si lourd sur l’actrice qu’elle se décide enfin, après plusieurs dizaines d’années, de renouer le contact à l’initiative de son mari pour « affronter son passé ». A travers des incursions dans ce passé, on revit grâce à Clémence Boulouque certaines périodes de la vie de l’actrice, que rien ne prédisposait à avoir une telle carrière ; elle aborde notamment son enfance très timide, où la danse devint rapidement son seul exutoire.
L’une des choses qui m’a le plus frappé est l’interrogation permanente dont fait preuve Audrey Hepburn sur son talent ; elle doute énormément d’elle même :
« Elle avait sur eux la seule supériorité des anxieux, toutes leurs critiques ne seraient jamais aussi perçantes que celles qu’elle portait sur elle. Elle avait appris à danser et n’avait pu devenir une étoile ; elle n’avait pas appris à jouer et avait été acclamée. Elle conserverait ce complexe d’illégitimité. »
Elle manifestait du reste une grande mansuétude à l’égard des autres, comme l’atteste cette confession qu’elle fera un jour à un journaliste :
« Les gens, plus encore que les objets, doivent être restaurés, réhabilités. Il faut leur redonner vie, les faire revenir à soi, et leur pardonner : ne jamais jeter quiconque. »
Le grand mérite de l’auteure est de ne nous révéler que ce qui est essentiel ; elle nous fait effleurer la vie d’Audrey avec délicatesse. Grâce à une écriture très fine, et un découpage des phrases qui invite le lecteur à savourer le livre à petites gorgées, j’ai beaucoup apprécié ce court roman (à peine 120 pages) qui représente un très beau moment de lecture.
Sans trahir la fin du livre, je souhaitais également partager avec vous cette très jolie phrase qui scelle la rencontre :
« Et soudain, elle était en paix – cette sensation de blancheur qu’elle avait connue après des deuils : la peine est épuisée, il ne reste qu’à accepter. »
Ainsi, parmi les livres de cette rentrée littéraire 2016, vous ne serez donc pas surpris par ma recommandation :
X Achetez-le chez votre libraire
X ou allez l’emprunter dans votre bibliothèque
lisez plutôt autre chose
Réf : Un instant de grâce de Clémence Boulouque. Flammarion, 2016, 120 p
J’ai entendu parler de ce livre, il a déjà capté mon attention.
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Bravo pour ce beau billet du livre de Clémence Boulouque qui est un vrai bijou !
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