L’originalité n’est pas la moindre des qualités du premier roman d’Emilie Houssa, La nuit passera quand même. En effet, à partir d’une scène du film Victoria Victoria, où un garde du corps se retrouve coincé sur un balcon, elle se pose la question suivante : « Pourquoi, en effet, ne pas imaginer ce qu’auraient pu être les quarante premières années de Squash Bernstein pour qu’il arrive à ce balcon ? ». Elle choisit de le faire naître en France, en 1942, et de remonter avec nous le fil du temps…Le temps de prendre la liberté de rebaptiser son personnage principal Squatsh au lieu de Squash, Emilie Houssa nous entraîne dans le Paris de l’après-guerre, où la famille Bernstein vient de rentrer après avoir été hébergée en Normandie durant la guerre. Au père, Simon, à la mère Martha, propriétaires d’un boutique de décoration, s’ajoutent le frère aîné Ludovic, Squatsh, et bientôt Marie, la petite dernière.
L’un des mérites d’Emilie Houssa est d’arriver à nous rendre ses personnages attachants et l’on suit avec intérêt les évènements de la vie qu’ils traverseront : les plus heureux, comme les premières vacances à la mer ou les premiers amours, ou les plus maheureux, comme la guerre d’Algérie.
C’est en premier lieu Squatsh qui est au centre du roman bien évidemment, un Squatsh solitaire, mélancolique, rêveur qui n’hésite pas à s’enfermer dix-huit heures dans les toilettes pour méditer ! Un jeune garçon que sa mère inscrit dans une école de boxe quand elle le surprend à faire des pas de danse avec sa jeune soeur ; qui a du mal à trouver sa place dans le monde, découvrant et réprimant son homosexualité ; qui finalement deviendra garde du corps par souci de prendre soin des autres. S’il m’est impossible de trahir davantage l’histoire, je souhaitais partager avec vous quelques extraits du livre :
Squatsh continuait à vivre en essayant de se cogner le moins possible aux coins du réel. Le déni avait été remplacé par un contrôle absolu, un état d’urgence permanent. (…)
Dans son quotidien propre, le vide était maître. C’était son trésor, son repos. Lorsqu’il travaillait, Squatsh devrait être le plus discret possible, il devait se fondre dans le décor, se faire oublier. Dans sa vie à lui, il faisait la même chose. Il avait appris à disparaître. (…)
Il faut garder les corps et s’en garder aussi.
Une belle histoire, parfois triste, souvent émouvante, qui, si elle perd un peu de sa force dans la dernière partie, n’en constitue pas moins une jolie découverte. On ne s’étonne pas que l’auteure soit férue de cinéma car elle a le pouvoir de rendre très vivantes les 35 scènes de la vie de Squatsh et de sa famille.
Au final, je vous conseille donc :
X d’acheter ce livre chez votre libraire si vous souhaitez faire connaissance avec un nouvel auteur
X d’emprunter dans votre bibliothèque
de lire autre chose
La nuit passera quand même d’Emilie Houssa. Denoël, 2018. 272 pages.
Un beau billet qui donne envie de découvrir cet auteur et ce livre.
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Merci pour ce beau conseil et en plus j’aime bien les histoires tristes…
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