Il suffit parfois de bien peu de pages pour retranscrire toute une atmosphère et faire ressentir au lecteur la tension d’une situation. C’est ce que l’on se dit en refermant Le collier rouge écrit par Jean-Christophe Rufin. L’action se passe dans une petite ville du Berry, en août 1919. Dans la torpeur de l’été, un homme, Morlac, est en prison, tandis qu’à l’extérieur, son chien aboie sans discontinuer. Lantier, un juge militaire est dépêché pour venir interroger le prisonnier et le juger. De quoi cet homme s’est-il rendu coupable, lui qui s’était illustré durant la Grande Guerre et avait reçu la Légion d’Honneur ? Et quel rôle a joué ce chien dans l’affaire ?
Siégeant à l’Académie française depuis 2008, Jean-Christophe Rufin a publié un grand nombre de romans dont Rouge Brésil, Goncourt 2001, mais aussi des ouvrages tirés de son expérience humanitaire. Dans Le Collier rouge, il s’est inspiré d’un fait divers réel qui est arrivé au grand-père d’un ami photographe (à qui il dédie le livre).
Dans une ambiance rendue pesante par la chaleur omniprésente, le juge militaire Lantier est chargé d’interroger Morlac et de prononcer une sentence à son égard. Ce dernier s’est rendu coupable d’un geste répréhensible, dont on ne devinera la nature qu’à la fin du récit.
Dans le huis-clos qui s’installe entre les deux protagonistes dans cette prison peuplée seulement par l’accusé et un gardien, le juge fait parler Morlac qui se livre peu à peu, racontant son expérience de la guerre dans les Balkans. La différence de statut social entre les deux hommes s’estompe rapidement. Lantier, si prompt à rendre des décisions tranchées, essaie d’obtenir le repentir du prévenu, en vain :
« _ Je vous le répète, répondit Morlac. Mes actes, j’en suis responsable et je ne vois aucune raison de m’excuser.
Lui aussi, à l’évidence, était marqué par la guerre. Quelque chose, dans sa voix, disait qu’il était désespérément sincère. Comme si la certitude de mourir bientôt, éprouvée jour après jour au front, avait fait fondre en lui toutes les coques du mensonge, toutes ces peaux tannées que la vie, les épreuves, la fréquentation des autres déposent sur la vérité chez les hommes ordinaires. Ils avaient cela en commun, tous les deux, cette fatigue qui ôte toute force et toute envie de dire et de penser des choses qui ne soient pas vraies. »
Parallèlement, le juge mène l’enquête, rencontre la compagne de Morlac, et petit à petit, arrive à déchiffrer les vraies raisons de son acte. Riche en thèmes, le roman rappelle le climat d’agitation de ces années, évoque l’absurdité de la guerre mais surtout il nous permet une introspection dans la nature humaine ; l’amour, la fidélité (notamment symbolisée par le chien, dont l’attachement à son maître trouve en écho une certaine indifférence – on devinera le « pourquoi » à la fin) sont omniprésentes.
Une très belle lecture en conclusion et par conséquent un livre que je vous conseille :
X d’acheter chez votre libraire ou bouquiniste
X d’emprunter dans votre bibliothèque
lire autre chose
Le collier rouge, de Jean-Christophe Rufin. Folio, 2015, 176 pages.
J’aime bien cet auteur alors je note ce livre .merci
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J’ai été très touchée par cette histoire… J’ai d’ailleurs rédigé une chronique sur ce dernier sur mon blog.
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Il me faut prendre le temps d’aller lire ta chronique, dans ce cas
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Je n’ai pas été aussi enthousiaste à la lecture de ce livre mais indéniablement l’écriture de J C Rufin sauve le roman.
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Effectivement, en peu de pages, il parvient à rendre une grande richesse psychologique… d’où l’énorme déception en découvrant la récente adaptation cinématographique d’une platitude affligeante alors qu’il y avait tant de matière à exploiter…
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Je ne savais pas qu’il était sorti au cinéma. Je resterai donc sur mon impression positive à partir de la lecture. Merci!
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découvert en livre audio pour moi et j’avais beaucoup aimé, je m’étais même repassé certains passages!
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Merci pour le commentaire, c’est en effet un petit roman très fort
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