Maria Rosaria Valentini – Magnifica

Nous allons aujourd’hui nous rendre dans l’Italie des années 50 grâce à la plume de l’écrivaine italienne Maria Rosaria Valentini. Magnifica est son quatrième roman, le premier traduit en français. Lumineux, c’est l’adjectif qui me vient à l’esprit immédiatement en repensant à cette histoire et ses protagonistes. Un coup de cœur.

Que se passe-t-il quand une guerre se termine ?

(…)

Quelques acacias résistent mais c’est l’odeur de gravats, de pierre, de sable, de terre meuble et de ferraille qui domine. Les décombres engloutissent les derniers îlots de la peur. Au cœur du néant, l’espérance n’a pas de corps ; nul ne peut la toucher, nul ne peut s’agripper à l’une de ses mamelles et aspirer un colostrum qui nourrisse l’avenir. Pourtant l’espérance est perceptible. Elle avance pieds nus. S’habille d’absences. Susurre des vœux. Respire aux côtés de ceux qui ont faim de vie. Que les morts reposent en paix. Il n’y a rien d’autre à faire. Sinon inventer un commencement.

Dans un petit village des Abruzzes vit Ada Maria, une jeune fille intelligente et sensible. Ses parents cohabitent l’un à côté de l’autre dans une relation sans sentiment. Aniceto touche sa femme avec un seul but, engendrer un fils. Eufrasia vit ces instants avec dégoût et son esprit ne ressent la quiétude que quand son mari rejoint sa maîtresse Teresina.

La journée Aniceto restait à l’écart, il se cachait comme les crapauds. La guerre l’avait transformé, dilaté, vidé en privant sa volonté de toute l’énergie nécessaire pour travailler. Aux champs par exemple, ou au rafistolage des maisons, au déblaiement des rues ; car ainsi s’occupaient les autres hommes, à la fin de la guerre. Lui non.

S’il tentait de sortir, il se traînait d’un coin à l’autre du village : abruti, engourdi.

La nuit, par contre, il se réveillait.

Il voulait un fils ; Ada Maria ne lui suffisait pas.

Enfin, un an après la fin de la guerre, Pietrino vient au monde. Ce petit garçon frêle va développer progressivement une relation fusionnelle avec sa sœur. Celle-ci s’occupe des tâches ménagères et se perd souvent dans la nature. Dans la forêt, elle aperçoit un jour un homme et malgré l’effroi que ça lui procure, elle s’approche de lui.

(…) Mais va donc pas crier ça sur les toits, les gens en feront tout un plat. Oublie. Ça doit rester entre moi et toi. C’est sûrement un Allemand.

A partir de cette rencontre, Ada Maria s’éveille, s’épanouit, se met à rêver. Ses journées se suivent et pour le lecteur, il y a quelque chose de très poétique, rassurant, voire apaisant dans les descriptions des occupations de la jeune fille et ses observations dans la nature. L’écrivaine est également poétesse et ça se perçoit dans ces lignes.

De nombreuses femmes au village avaient repris le travail au carreau. Les points naissaient de virevoltes rapides, précises, régulières. A ces points elle pensa. Elle s’accrocha. Sagement, en silence, elle contint ses désirs et s’imagina dentellière de la patience.

En contraste avec cette langue douce, survient alors un événement tragique, de façon brutale, inattendue, mais je ne vais pas en raconter plus. Je vous encourage à le découvrir vous-même. Ne vous attendez-pas à une histoire classique et mainte fois répétée, sur l’amour interdit avec un soldat ennemi et des villageois vindicatifs. C’est un roman porteur d’espoir, sur la vie et les liens à la fois fragiles et forts qui unissent les gens, sur la solidarité. L’histoire enveloppe les vies et les générations en allant de la naissance à la mort, du printemps à l’hiver en donnant un sens même à des vies les plus banales, les plus courtes, à des rencontres furtives… Les personnages sont accompagnés par l’auteure avec beaucoup de tendresse et d’humilité. Un roman touchant que je vous conseille

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Magnifica, de Maria Rosaria Valentini. Traduit de l’italien par Lise Caillat. Denöel, 2018, 320 pages.

 

11 réflexions sur “Maria Rosaria Valentini – Magnifica

  1. luocine 7 octobre 2018 / 14:42

    Quel beau billet, je me suis sentie une envie très forte de me pli ter dans ce roman. Tu as bien réussi ton coup!

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  2. Lilly 7 octobre 2018 / 17:24

    On sent qu’il t’a émue ce roman, et si j’en crois les autres avis lus dessus, c’est une pépite de la rentrée littéraire. J’ai trop de livres en attente actuellement, mais je le note quand même.

    Aimé par 1 personne

    • Eva 7 octobre 2018 / 20:22

      Oui, c’est une histoire touchante et tendre (malgré les circonstances difficiles). J’espère qu’il va te plaire quand son temps viendra.

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  3. mjo 7 octobre 2018 / 17:39

    Moi aussi, à la lecture de ton billet, je l’ai noté illico sur mon carnet.

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    • Eva 7 octobre 2018 / 20:23

      Ça fait plaisir ! J’espère qu’il va te plaire 😊

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  4. Goran 8 octobre 2018 / 15:25

    Je n’ai pas noté ce titre immédiatement dans mon carnet, mais tu donnes très envie… 🙂

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  5. aleslire 14 octobre 2018 / 09:46

    Très, très très tentée moi aussi, mais pas avant sa sortie en poche ( ou chez un bouquiniste, on ne sait jamais !)

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    • Eva 14 octobre 2018 / 10:42

      Bonne idée ! En général je fais pareil : j’attends la sortie en poche 🙂

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