Et si on bouquinait un peu ?

Le lâche de Jarred Mc Ginnis est un des romans de la rentrée littéraire que l’on voit régulièrement commenté sur les réseaux sociaux, je me réjouissais donc à mon tour de découvrir l’histoire de ce jeune homme de 26 ans, qui vient de sortir de l’hôpital et passera désormais sa vie sur un fauteuil roulant. Il retourne chez son père après 10 ans d’absence et des relations qu’on devine compliquées…

_ On fait la paix ?

_ Jarred, tu es le seul à faire la guerre.

Le livre est inspiré de l’histoire de l’auteur, et Jarred McGinnis en est le personnage principal. Le récit est structuré en deux lignes distinctes. Dans la première, le jeune homme qu’il était nous parle de sa mère décédée d’une rupture d’anévrisme, de ses relations de plus en plus difficiles avec son père en proie à l’alcoolisme, son adolescence rebelle partagée entre fugues, vols… jusqu’à cet accident qui lui coûtera l’usage de ses jambes, mais aussi la vie à l’amie d’enfance qui l’accompagnait en voiture.

_ Le dossier dit que l’effondrement de l’unité familiale a été causé par le décès inattendu de la mère. C’est exact ?

Il évoquait la mère disparue comme on parle du carburateur foutu. Une pièce mécanique qui rend l’âme; Pour le docteur-boucher, elle était « la mère ». Ça m’allait bien. Il n’avait aucun droit d’utiliser son nom.

Au bout d’un mois d’internement, je suis devenu un adepte du langage clinique et thérapeutique pour slalomer entre ce que les gens voulaient entendre sans jamais toucher à la culpabilité que je ressentais concernant la mort de maman, la honte d’avoir un père alcoolique, la violence, la colère tous azimuts, la solitude, la confusion et surtout la tristesse débordante qui me prenait au corps.

Le récit au présent nous parle de la vie de Jarred après sa sortie de l’hopital, le retour chez son père, et la difficile cohabitation qui semble se profiler.

J’étais désormais un paraplégique de vingt-six ans sans un sou en poche qui rentrait vivre à la maison avec un homme, mon père, que je n’avais pas vu, avec lequel je n’avais pas échangé un mot, depuis dix ans. Ce serait la porte ouverte aux mauvaises blagues de Jack, aux fantômes accusateurs et à la déchéance prématurée qui attendaient l’invalide que j’étais.

Le lecteur est tenu en haleine par les deux histoires et le questionnement, à savoir comment a déraillé la vie de ce garçon et s’il va pouvoir se reconstruire après l’accident et renouer la relation avec son père. A travers Jarred, marqué par la culpabilité, l’agressivité, les étâts d’âme (que l’auteur arrive très bien à retranscrire), le livre évoque moultes thèmes comme les relations familiales, l’impossibilité de communiquer, le pardon, la reconstruction… le tout en dosant l’humour et l’émotion.

_ Et si tu arrêtais un peu d’être un connard d’égoïste ? Hein ? Et si tu me demandais un peu ce qui m’est arrivé ces dix dernières années ? Ce que j’ai fait ? Où je suis allé ? Je vais te le dire. Je ne suis jamais allé nulle part au cas où le téléphone sonnerait et que tu aurais besoin de moi. Demande-moi combien de temps j’ai mis pour apprendre à arrêter de me ronger les sangs pour toi. Combien de temps il m’a fallu pour me dire, quand le téléphone sonnait, que c’étaient pas forcément les flics ou un hôpital pour m’annoncer que tu étais mort.

Au final, un premier roman que j’ai beaucoup apprécié et sur lequel vous pouvez lire d’autres avis pour la plupart très positifs chez Livrescapades, Les livres d’Eve, Sur la route de Jostein, Mot-à-mots.

Un grand merci à Lecteurs.com et les éditions Métailié pour m’avoir fait parvenir ce livre que je vous conseille de découvrir en :

X l’achetant chez votre libraire

X l’empruntant dans votre bibliothèque

lisant autre chose

Le lâche, de Jarred McGinnis, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Marc Amfreville. Métailié, 2022, 352 pages.

Lecture faite dans le cadre des lectures thématiques « Autour du handicap » que nous organisons avec Ingannmic.