
Moins d’une année après vous avoir parlé d’Olga, je vous présente un autre titre d’un des auteurs allemands contemporains les plus connus, Bernhard Schlink. Dans son dernier livre, La petite-fille, l’auteur nous emmène outre-Rhin pour y explorer la société allemande, et principalement les Völkisch, ces familles vivant sous la doctrine de l’extrême droite.
Certaines personnes ne pouvaient pas être arrachées à leur sol ; c’est dans ce sol, bon ou mauvais, qu’elles avaient leurs racines et seulement sur lui qu’elles pouvaient grandir.
L’histoire commence par un événement tragique : en rentrant de son travail, Kaspar découvre le corps de son épouse Birgit, sans vie. Suicide ? Connaissant son penchant pour l’alcool, Kaspar pense plutôt à un accident. Peu importe finalement la cause de son décès, Kaspar se retrouve seul et, après avoir reçu une lettre d’un monsieur intéressé à éditer le livre sur lequel Birgit aurait travaillé, il se met à inspecter son petit bureau minutieusement. Il découvre alors des textes et avec eux l’existence d’un bébé que Birgit aurait abandonné à la naissance. Kaspar part à sa recherche…
Divisé en trois parties, l’histoire se concentre sur une longue période allant des années 60 jusqu’à aujourd’hui. Grâce aux textes que Kaspar lit progressivement, on apprend les détails non seulement sur leur rencontre à Berlin-Est (j’ai beaucoup apprécié les escapades de Kaspar à l’Est et ses observations), mais aussi sur les débuts de leur vie commune à l’Ouest.
Au cours du semestre, il est vrai que personne, professeurs ou étudiants, ne me traita avec condescendence. Mais quand j’évoquais une perspective ou employais une expression de l’Est, j’agaçais ; on attendait de moi qu’en quittant la RDA je laisse derrière moi tout ce qui en faisait partie, parce que c’était soviétique et communiste, et que désormais je sois comme eux.
Dans la deuxième partie, Kaspar retrouve la trace de Svenja et de sa fille Sigrun et se voit propulsé dans le monde des néo-nazis. Etant fortement allergique (comme Kaspar) à ces discours idéologiques sans queue ni tête, j’avoue que j’en ai eu assez. Et elle en a des idées, cette jeune Sigrun… allant de la race pure jusqu’à la négation de l’Holocauste. Tandis que Kaspar privilégiait le silence ou une remarque philosophique pour semer une graine de bon sens, j’ai grincé des dents et n’en pouvais plus. Et quelle fut longue, cette deuxième partie…
Tu ne te bats même pas contre moi. Ce que je dis ne te va pas, mais tu n’y opposes rien, non, tu prends un air compréhensif, peut-être soucieux, peut-être triste.
En somme, tout le livre fait en quelque sorte écho à son précédent roman, en commençant à peu près là où on a quitté Olga, c’est à dire dans les années 60/70. Il reprend également la critique des idées sur la grandeur de l’Allemagne – dans le personnage de Kaspar, on pourrait même voir une version masculine d’Olga, tant ils se rejoignent dans leur incompréhension pour tout ce qui touche à l’extrême droite et ses discours. Les deux sont intelligents, aiment la lecture et la culture en général, cherchent à comprendre plutôt qu’à diviser.
Tandis que je prenais Olga en affection, j’ai éprouvé plus de difficultés avec Kaspar que j’ai trouvé effacé et pâle… Là où les autres manifestent de la haine, il arrive en proposant des livres et des oeuvres de musique classique tel un chevalier (le livre donne en tout cas envie d’acheter un gramophone). J’aurais préféré un Kaspar un peu plus complexe. Pareil pour Sigrun dont le comportement peu naturel ne correspondait pas, selon moi, à ses 14 ans, mais plutôt à un petit soldat capable de mener des échanges philosophiques. Peut-être était-ce pour souligner son éducation suivant un endoctriment bien précis ? Finalement, c’est le personnage de Birgit qui ressortait des pages en chair et en os, perdu, complexe, en plein doute.
Vous l’aurez compris : même si Bernhard Schlink a choisi un sujet très intéressant, même s’il a soulevé des questions pertinentes, pointé du doigt des Völkisch, et en dépit de l’écriture, j’ai éprouvé un manque d’un côté et une overdose de l’autre. Ca ne m’arrêtera néanmoins pas dans ma découverte de l’oeuvre de l’auteur.
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La petite-fille, de Bernhard Schlink. Traduit de l’allemand par Bernard Lortholary. Gallimard, 2023, 331 pages
Olga m’attire clairement plus au vu de tes deux chroniques, mais je n’avais pas été emballée par Le liseur, qui a pourtant fait (globalement) l’unanimité. Mais je suis prête à réviser mon opinion sur cet auteur si je trouve le bon roman !
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Je n’avais entendu que des éloges à propos de ce livre mais cet aprem ma bibliothécaire paraissait aussi mitigée que toi… Et ce sera ma prochaine lecture, me voilà un peu refroidie.
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J’ai beaucoup aimé cette lecture que je chroniquerai au mois de novembre pour le moment que vous réservez à la littérature allemande. Je ne savais rien sur ce mouvement Volkish donc cela m’a intéressée. Je trouve aussi que le désarroi des parents face aux errances idéologiques de leur enfant est très bien vu. Un excellent roman selon moi.
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Pour une fois, je l’ai lu (on me l’a prêté) , j’étais intéressée a priori sans trop en savoir, ça c’est bien, mais j’avoue mettre un peu perdue ou ennuyée, parfois passionnée, quand même. C’est un peu froid, à la limite les personnages ne m’intéressaient pas trop. ^_^
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oups : m’être
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Je n’ai pas eu tes réserves mais, ceci dit, elles me font réfléchir.
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J’avais également beaucoup aimé Olga, je l’ai préféré, mais la lecture de celui-ci a tout de même été prenante. Une lecture édifiante. Je crois que oui, l’auteur nous montre que Sigrun est un petit soldat, que l’on peut transformer des enfants en soldat.
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Je compte bien le lire… en l’empruntant à la médiathèque ! 😉
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Je commencerai donc par Olga
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