
Maille à maille, de Simone Righetti, est un court roman relatant l’histoire d’une fillette juive, devenue le jouet d’une fille de 12 ans, Erika, clouée dans un fauteuil roulant, et dont le père est officier nazi. Un beau roman sur la guerre, les blessures de l’enfance, mais aussi sur la reconstruction et le pardon.
Maille à maille fait l’objet d’une lecture commune « Autour du handicap »
S’appelle-t-elle Gerda ou Sarah ? Quand est-elle née ? Autant de questions que se pose le personnage principal, devenu adulte et qui, de la même façon qu’elle s’adonne à son tricot, essaie de se reconstruire, maille à maille…
Enfant juive sortie d’Auschwitz par le capitaine Karl Gestaker, père d’Erika, en réponse au caprice de sa fille qui souhaitait avoir une petite fille pour s’amuser, elle est maltraitée par celle-ci. La façon dont le père parle de la fillette en dit long sur la considération qu’il lui porte :
_ Même s’il ne s’agit que d’une juive, il faut en avoir soin et la faire durer. Si tu l’abîmes, je ne pourrai pas t’en avoir une autre. Essaye de prendre un peu plus soin de celle-là… En grandissant, elle deviendra plus intéressante.
Son seul salut s’appelle « Poisson », la domestique sourde et muette qui lui donne l’amour dont elle est privée.
Même si elle finit par sortir de cette détention, elle en garde des séquelles très fortes à l’âge adulte. On suit ainsi les pas de Sarah / Gerda tout au long de sa vie. Recluse, réfugiée dans un orphelinat, elle s’ouvre petit à petit à la vie. Ceci est rendu très perceptible également par le procédé narratif. Il s’agit d’abord d’un narrateur extérieur, jusqu’à ce que Sarah prenne enfin les « rênes » du récit, comme de sa vie.
C’est un roman très touchant, plein d’espoir aussi malgré la dureté qui se dégage des pages où Erika maltraite « son jouet ». Même le père, dur officier nazi nommé responsable du camp d’Auschwitz, a en lui une part d’humanité en mettant sa fille handicapée au premier rang de ses priorités. Sarah recroisera par hasard le chemin d’Erika. En laissant place au pardon, à l’amour, plutôt qu’à la vengeance, elle saura se reconstruire.
Certes, il y a dans ce livre quelques hasards un peu poussés, mais on les excusera pour garder l’esprit d’humanité qui imprégne ces pages.
Je vous conseille donc :
x d’acheter le livre votre libraire
x de l’emprunter dans votre bibliothèque
de lire autre chose
Maille à maille, de Simone Righetti. Editions parole, collection main de femme, 2020. 204 pages.
Ce livre a été lu dans dans le cadre du thème Autour du handicap et des Lectures communes autour de l’Holocauste.
N’hésitez pas à aller lire l’avis de Book’Ing qui nous accompagnait pour cette lecture commune.
Nos avis se rejoignent dans l’ensemble, je garderai en effet de cette lecture cette notion d’ambivalence, la manière dont les individus peuvent abriter en eux la tendresse comme la cruauté, et le douloureux parcours de Gerda/Sarah pour se reconstruire en acceptant les sentiments contradictoires qui la hantent.
J’aimeAimé par 1 personne
Excellent résumé – et un grand nombre de messages pour un petit livre !
J’aimeJ’aime
Je me pose une question qui me vient de « les abeilles d’hiver » livre trouvé sur ton blog . Comment une enfant handicapée à pu survivre à la politique eugénique nazie ?
J’aimeAimé par 1 personne
Voilà une très bonne question. Elle était en quelque sorte cachée par son père, qui était de plus un officier modèle… mais je ne saurai t’en dire plus.
J’aimeJ’aime
La question de Luocine est intéressante en effet. Choix purement narratif? Je n’ai pas lu le roman mais peut-être que l’autrice mentionne qqch à ce sujet…?
J’aimeAimé par 1 personne
Oui, c’est une bonne remarque, mais je ne me souviens pas d’une quelconque mention sur ce point-là
J’aimeJ’aime
La question de Luocine est pertinente, tiens!
J’aimeAimé par 1 personne
Très juste, et je suis bien en peine de trouver une réponse !
J’aimeJ’aime
Son père parvient tant bien que mal à la dissimuler = il est d’ailleurs soulagé d’avoir été muté à Auschwitz, où il peut limiter au maximum sa vie publique, et la jeune handicapée a pour consigne de ne pas sortir de leur maison. Par ailleurs, il fait preuve d’un excès de zèle afin que son irréprochabilité évite que l’on vienne « creuser » la part personnelle de sa vie.. mais son angoisse à l’idée que sa fille puisse être « repérée » est évoquée à plusieurs reprises.
J’aimeAimé par 1 personne
Merci, j’avais oublié et aspect ! Ca clarifie 🙂
J’aimeJ’aime